Emporte-moi
« Vas me chercher les coupes
Et ne te trompe plus ! »
Et je plongeais tête la première dans l’armoire sombre aux têtes de dragon
Immense
Dénicher deux ou trois coupes à champagne
Basses et bien rondes …
J’avais, pour ne pas les confondre, ma formule secrète :
Une coupe pour le doux …
La flute pour le brut :
Tout est histoire de rime
Ou d’assonance
C’est dans la moiteur des après-midi
Pâtisserie
Que j’ai découvert la poésie !
Pas d’emporte-pièces dans la cuisine fonctionnelle
d’une grand-mère naturellement adepte du détournement
Nos biscuits de Noël avaient la rondeur de ses coupes à champagne
Leurs bulles blondes éclataient dans la tiédeur du four
Et j’attendais, les yeux mi-clos, que l’ivresse me monte au palais
Il a fallu longtemps avant que le Terrible « emporte-pièce » ne me soit présenté
Notre rencontre fut rapide, furtive, mais me laissa un temps dans la perplexité
C’était chez mon amie d’enfance
Dans la magie du fournil de ses parents :
« Apporte-moi l’emporte-pièce »
Et moi j’ai vu surgir un géant aux mains immenses
Aux bras de tornade
Il ne sortait que la nuit
Emportait chambres et cuisines
Pendant que vous dormiez
Ne laissant à jamais
Que meubles hébétés :
C’était donc là qu’il se cachait …
Ma stupeur passée, je vis des formes apparaître
Laisser leur empreinte dans la pâte
Et mon sourire dans les brioches
Mais je l’avais fait naître
Et mon terrible emporte-pièce
Ne m’a jamais plus quittée
Et aujourd’hui je crois bien qu’il vit encore caché
Au fond de mon cagibi magique
Là où je range le bric à brac
De ma mémoire …
Tant qu’il me laisse mes pieds de roses
Et puis aussi mes speculoos
La mini-serre
Et le jardin d’hiver
Les chambres des enfants …
Et mon canapé blanc
Et puis peut-être qu’une nuit,
il m’emportera moi aussi
Mais seulement pour une nuit
Dans son Monde aux Mille et Une pièces
Juste histoire de voir …
Voilà l’histoire et voici le Jeu
de Birgit, qui la fit ressusciter de ma mémoire
Pour elle, ma petite mais sincère collection d’emporte-pièce …
7 réflexions sur « Emporte-moi »
C’est ton histoire qui m’emporte, poète!
superbe!! j’ai adoré te lire!!!
ma mère aussi se servait des verres pour les petits sablés de noël…depuis,elle s’est mise « au gout du jour » bravo pour ce joli texte!
Vraiment un très joli texte que j’ai pris un réel plaisir à lire. Tu as su sublimer ces petits emporte pièce que j’ai aussi !
Tes mots comme toujours nous emportent dans un tourbillon, l’espace d’un instant j’ai revu ma fille toute petite les mains pleines de pâte et de chocolat, le sourire béat devant ses premiers biscuits de Noël. Merci
Bisous
Ton cook toy empreint de poésie a le charme de tes mots et le petit rayon de soleil leur donne un charme fou.
Merci de ta participation.
A très bientôt
Birgit
En lisant ton récit je pouvais presque sentir l’odeur qui se dégageait de l’armoire… car il y en avait forcément une non ? Merci pour ce plongeon en enfance, j’ai du mal à revenir à la surface !!! Hihi !
Bises
Je ne regarderais plus mes emporte pièces de la même façon maintenant… et tu me fais penser que j’ai justement une recette de spéculoos en attente de test ! Bisous, marie